Roger est enseignant en maths et vient de rater sa première inspection, au motif qu’il manque par trop d’empathie avec ses élèves. Il s’est mis la barre trop haute pour cette séquence et a perdu les jeunes. Il n’a plus confiance en lui et il est prêt à changer de métier… Il est triste et en colère.
Je lui demande d’identifier ces émotions, et de se relaxer avant la séance, c’est important pour que le cheval ne les reçoive pas ainsi brutes de décoffrage, ce sont des animaux sensibles et il faut faire attention à eux.
Lorsque Roger va mieux, Bryum vient le choisir à la porte du pré.
Ils entrent dans le rond et ils restent ensembles un bon moment sans bouger, s’apprivoisant l’un l’autre. Je vois que Roger parle beaucoup à Bryum, je ne sais pas ce qu’il lui dit, ce n’est pas important car cela n’appartient qu’à eux.
Roger brosse longuement Bryum, puis il se tourne vers moi en me disant qu’il a envie de faire des choses avec lui. Je lui donne quelques techniques pour installer le « join up » : à l’aide d’une chambrière, sorte de long fouet, que je lui apprend à manier avec mesure, comme si c’était un prolongement de son bras et non comme une arme effrayante, il incite Bryum à courir autour du rond, puis lorsque le contact est bien établi il laisse tomber la chambrière et tourne le dos à Bryum qui vient se placer derrière lui, et se met à le suivre partout.
Roger fait preuve d’une grande sensibilité et d’un bon timing (sentir lorsqu’il faut insister ou au contraire lâcher la pression) et Bryum joue le jeu, avec un plaisir manifeste. Ils se déplacent, changent de direction et d’allure, sautent de petits obstacles ensembles, Bryum vissé à Roger comme s’ils ne faisaient qu’un. Roger arbore un grand sourire à la fin de la séance, et me dit après que ça lui a redonné confiance. Je lui dit que tout ce que j’ai vu n’aurait pas été possible sans une grande faculté d’empathie de sa part. Ça le rassure.
L’année d’après il passe son inspection avec succès.